29 septembre 2022
Mon séjour en montagne avec les jeunes
Christian a été médecin au sein du Centre de santé pendant de longues années. Il vient de prendre sa retraite et s’est engagé comme bénévole. Il a accompagné le séjour en montagne avec les jeunes du Un Chez-soi d’Abord Jeunes.
Comment écrire, restituer l’exploit, l’expérience si intense, belle et constructive d’un séjour en montagne à onze personnes : 7 jeunes lillois, 4 encadrants de l’abej SOLIDARITÉ dont un bénévole (moi), accueillis par une très belle association : 82 400 Solidaire l’alpinisme pour tous !
Démarrage un peu bousculé !
Il y a eu un doute sur le départ : tous les jeunes n’étaient pas présents à la réunion de préparation, quelques difficultés d’organisations pour l’équipe, des délais très courts…. Mais au final c’est avec beaucoup d’enthousiasme que nous nous sommes mis en marche pour ce séjour en montagne. Et cette marche de préparation a permis de faire connaissance et d’avoir un début de très bonne cohésion entre nous tous : déjà beaucoup de rires et de bonne humeur.
Je parle beaucoup avec Kevin qui m’inquiète un peu sur une forte douleur au genou (séquelles d’accident). Je pense qu’avec quelques conseils et un bon strapping ça ira. La confiance s’installe.
Jour 1 : départ et voyage et… premières émotions
Nous nous installons dans le train, en forme, heureux de cette perspective de séjour en montagne. Stressés, un peu, aussi : escalade… glacier…4000 mètres. Vais-je y arriver ? Zyneb, infirmière, mon « binôme » médical et moi avec la même question : « n’ai-je rien oublié ? » (j’avais de quoi monter un hôpital de campagne… bien de trop, mais sait-on jamais…)
Arrivée à Paris avec un peu de retard : la queue pour prendre les tickets de métro, pas prévue, et malgré une tentative bien organisée pour aller au distributeur le moins bondé…on rate le train !
Mais le sourire est de rigueur, Seb a toujours le mot pour rire, François garde son calme, très pratique et réactif, chacun veille l’un sur l’autre pour ne pas se perdre, attendre les moins rapides, se regrouper et tenter de sauver la situation. Je sais déjà que notre équipe se soude bien, que ça « matche » entre nous.On finit par trouver un train qui nous aménera à la donne heure à destination : ouf ! L’ambiance n’en a été que meilleure : des fous rire, des échanges, déjà une belle cohésion.
Chrisitan (un autre !), bénévole de l’association 82 4000, nous attend et nous emmène au chalet : tout est prévu, un bon repas nous attend. Puis on se répartit les chambres, tout le monde trouve sa place.
Un planning a été préparé par l’équipe encadrante pour les repas, le ménage, la vaisselle . L’organisation est top et permet de bien gérer les imprévus inévitables dans toute aventure humaine.
Je me sens très à l’aise avec l’équipe d’encadrement, très professionnelle et proche aussi des jeunes. Carrée et souple à la fois, à l’écoute. Debout avant tout le monde, sans faire « à la place de » mais stimulante. Proposant de chercher sa solution, recadrante si besoin, bienveillante et gaie, détendue et avec une belle anticipation de l’organisation. Et j’ai de l’émotion en écrivant cela, car pour moi, comme pour tous, je le sais, cette expérience est forte et inoubliable ! Des recadrages il y en eu parfois, mais peu et qui se sont toujours terminés en expérience positive.
Jour 2 : marche sur la roche avec Jean-Yves (guide de haute montagne bénévole) : escalade au programme
Petite inquiétude de certains jeunes… Et « mon » Kevin se rapproche de moi en disant » ah non, avec mon genou, je peux pas faire ça ! »…. Bon, allez Kevin, on reste ensemble et on va au moins commencer. Et Kevin a commencé, râlé, continué, découvert, eu très peur et a fini : Bravo Kevin ! Je ne sais pas qui de nous deux étaient le plus fier ! Le genou (que j’avais bien examiné et strappé) a bien tenu !
Le passage par une petite grotte à la sortie étroite a été compliqué pour certains, mais franchie par tous.
Puis escalade : première expérience pour tous, sauf moi. Et tous se sont dépassés ! Chacune et chacun, encadrant compris, se sont confrontés au rocher, à l’encordement, ont été au-delà de ce qu’ils pensaient. Francesca , Zyneb aussi malgré son appréhension, François s’est acharné sur toutes les voies et a fini par faire celle qu’il n’avait pas réussi au début. Mehdi s’est surpris lui-même. Adama et Souleyman ont été bluffant, Julien et Sébastien se sont acharnés jusqu’à dépaser l’obstable, Séraphine a assuré et avec élégance : pour une première, vraiment bravo !
Cerise sur le gâteau : plusieurs jeunes ont pu assurer un grimpeur, encadrés par un des moniteurs-guides. Une expérience forte car on doit être très attentif, concentré, la vie du grimpeur est entre tes mains à ce moment-là. Merci Séraphin : je me suis senti en confiance quand tu m’as assuré !
C’est ça l’escalade, la cordée : se dépasser, faire confiance, trouver le bon équilibre, sentir le rocher sous les doigts et finir par la fierté de l’avoir fait, d’être en haut, et de voir le paysage fantastique.
Le repas du soir a été bien animé…. Et la nuit bien bonne….
Jour 3 : la via ferrata
Ah … ! Oh-là… ! Mais qu’est-ce qu’ils vont nous faire faire là…. Pas mal de questions et d’inquiétudes….
2 groupes, 2 voies : une un peu plus facile. Nous étions encordés deux à deux, en plus des dégaines de via ferrata bien sûr ! Le fait d’être encordé avec un des encadrants ou guides permettait une double sécurité mais aussi une relation très intense et unique entre les deux personnes.
14h, il pleut mais nous décidons de continuer. Nous voyons le village de Monérier tout au fond de la vallée : image de carte postale. Superbe !
Au retour, la pluie s’arrête, les deux groupent se retrouvent et direction le lac. Baignade dans une eau bien fraîche, belle ambiance au programme.
Les liens d’amitiés, de partage, de confiance se renforcent encore ! Les confidences aussi. On prend le temps de dialoguer, il reste du temps avant le repas, Julien me parle de son expérience de stage, de ses projets et envies. On a gardé contact, il m’appelle pour me dire où il en est.
Ces temps libres sont précieux : temps pour soi, temps de partages improvisés, temps de rangement ou de repos, temps pour boire un pot.
J’ai gardé le contact avec certains, Kevin qui a quasi cessé de fumer et d’autres pour lesquels des projets se forment, Julien et son projet de stage, Sébastien qui viendra peut-être grimper avec moi à La Deule…
C’est en cela que ce type d’expérience et de séjour est très fort les projets qui se renforcent, les liens qui se créent de façon naturelle, les confidences, les partages, parfois des tranches de vie qui se disent pour la première fois, de relations profondément humaines, simples, d’humain à humain.
Jour 4 : direction le refuge
Ça y est, on arrive déjà au but ultime du séjour : monter à 4000 mètres, marcher sur un glacier. De multiples expériences nouvelles en seulement 48 heures.
Départ matinal pour prendre le téléphérique accompagné de Gérard, guide de haute montagne : eh oui, on ne va pas gravir 2000 mètres sur la journée !
Le téléphérique nous emmène là-haut à 2000 mètres. C’est déjà une rude épreuve pour certains, pris de vertige et même de nausées dans ces cabines suspendues au-dessus du vide, qui s’arrêtent parfois le temps de laisser sortir les passagers des cabines précédentes aux gares aériennes. Entre deux averses et nuages, le spectacle est époustouflant. Et les émotions intenses, suspendus dans le vide.
Direction le reguge Evariste Chancelle : 2 heures de marche en haute montagne, sac sur le dos avec pique-nique, eau, sac de couchage, vêtements et équipement de montagne pour aller sur le glacier demain. C’est pour certain l’apprentissage de la marche en montagne, de la gestion de la soif, de la hauteur et, malgré le temps nuageux et quelques gouttes de pluie, un spectacle magnifique et un double arc en ciel. Nous passerons aussi à côté d’un magnifique lac de montagne : on en a plein les yeux !
L’arrivée au refuge est un soulagement, le temps s’est dégagé, le point de vue sur les Alpes extraordinaire : et il y a de la neige tout près, de la glace sur le sommet d’en face ! On ressent en chacun un grand calme, un respect de cette beauté, une admiration de ce paysage fabuleux et aussi la fierté d’avoir transpiré, lutté pour gravir cette première ascension pendant près de trois heures.
Repas détendu puis coucher tôt dans le dortoir commun en lits superposés.
Jour 5 : le glacier de la Girose
L’arrivée sur le glacier est inoubliable.
Les guides on bien jaugé les capacités des uns et des autres et nous partagent en deux groupes : l’un ira jusqu’au sommet au col des lauzes (4200 mètres) et l’autre q fera le tour des crevasses. Kevin avait dit : « pas question pour moi d’aller sur le glacier ! » Et….une fois de plus, il est venu, s’est laisser gagner par la confiance et m’a dit : en fait j’aurais aimé aller au sommet des Lauzes et j’y serai arrivé.
L’orage a éclaté , vite chemin du retour… Encore une expérience inoubliable : un orage en montagne, sur un glacier ! J’ai à nouveau mesuré à quel point la confiance porté au guide est importante.
Nous sommes repartis ensemble vers le téléphérique, le cœur gonflé à bloc, les yeux et le cerveau plein de cette magnifique montagne, de ses glaciers, lacs et cascades, la joie au cœur.
Jour 6 : le retour … déjà !
Tôt le matin tout le monde (presque…) est levé, le petit déjeuner, on finit de préparer les sacs, donner un dernier coup de nettoyage, faire la vaisselle.
Le retour dans le train sera calme, joyeux, avec un peu plus de siestes qu’à l’aller.
Conclusions
Très vite nous nous sommes apprivoisés les uns les autres. Bien-sûr il y avait le responsable encadrants et les jeunes mais bien souvent nous avons été d’égal à égal, partageant nos vies, nos expériences, nos émotions. Nous avons tous donné et reçus, de façon réellement authentique.
La montagne et les bénévoles de 82 4000 ont largement favorisé cette très belle expérience de vie grâce à une bonne organisation, un beau désir de donner de soi et de la passion de la montagne.Merci à vous les jeunes d’avoir joué le jeu, dépassé vos peurs, vos limites, d’avoir donné de votre bonne humeur, de votre confiance et pour vos partages de vie. Merci François, Mehdi, Zyneb : notre coopération était si harmonieuse.
Prêt à repartir ? OUI !!!