2 mai 2025

Elsa, médiatrice de santé paire au Samsah

J’ai commencé à travailler avec l’équipe du SAMSAH, en tant que médiatrice santé paire (MSP ou paire aidante) il y a plus de 4 ans. Ce poste était à pourvoir en même temps qu’il ouvrait les portes de la formation en licence 3 de Sciences Sanitaires et Sociales option MSP (Paris 13).

Je ne connaissais pas grand-chose aux spécificités de ce nouveau métier de MSP.

Cependant le simple fait de transformer une expérience liée à beaucoup de souffrance en une force, en mettant clairement sur la table une partie souvent cachée de ma vie m’a plu.

Cela me séduisait de pouvoir prendre ma revanche sur mes troubles. Dans un parcours de rétablissement on apprend à vivre avec plutôt qu’à lutter contre. C’est une des phrases qu’un psychiatre m’a dit au tout début de mon accompagnement ; c’était bizarre d’entendre ça à ce moment-là pour moi car je voulais juste éliminer tout ce qui commençait à dysfonctionner et je n’avais pas du tout envie d’apprendre à vivre avec. J’étais mise K.O. mais je n’avais pas dit mon dernier mot. Alors oui, ce poste a un petit gout de revanche, qui me fait du bien ! Même si j’ai quand même dû apprendre et comprendre pour vivre avec.

Les premiers temps de la maladie psychique se vivent souvent dans l’ombre. Comme si une partie de nous était dans une cachette. Ne pas se faire prendre. Ne pas avoir l’air bizarre. S’épuiser à montrer une normalité qui déraille une fois seule.

Dévoiler ses zones de faiblesse dans un monde où la performance, la réussite et l’efficacité sont valorisées est très difficile. Ce contexte participe au silence, et permet à la maladie de s’épanouir. Car selon mon expérience, plus on met en lumière ces bizarreries en en parlant ouvertement moins elles s’installent. Encore faut-il savoir et pouvoir en parler, et c’est pourquoi la santé mentale doit être communautaire. Moins on sera seul avec ça, moins les difficultés s’installeront, et moins le rétablissement sera difficile.

Ce métier de MSP est aussi pour moi une façon de sortir d’une vision binaire des choses. Être malade/pas malade. Être fort/être fragile. Être patient/être professionnel. Il s’agit en fait de se servir de ses forces qui sont nées de ses fragilités, de pouvoir passer de l’un à l’autre, de nuancer et surtout ne pas s’enfermer dans un rôle ou dans un autre. En équipe il s’agit de compléter ses savoirs qu’ils soient issus de l’université, ou de l’expérience des lits d’hôpitaux.

Par rapport au métier et comment le mettre en œuvre auprès des personnes, j’ignorais comment faire. Je savais que le mot « pair » induisait une notion d’égalité, et je savais ce que cela voulait dire dans le champ du médico-social. Introduire des pairs dans les dispositifs d’accueil et d’accompagnement des personnes me paraissait une évidence. Dès lors qu’on a un vécu de personnes concernées -en psychiatrie mais cela vaut pour d’autres domaines- on a forcément expérimenté comme le soutien de ses pairs a un énorme impact. Cela a été mon cas au sein d’une association d’usagers. Cela a été un déclic pour moi de voir des personnes témoigner de leur rétablissement et ça a enclenché un réel mouvement de soin.

Avant d’arriver au Samsah, j’étais déjà professionnellement dans l’accompagnement de personnes en difficultés mais en tant qu’intervenante artistique ou animatrice. Et j’avais toujours fait en sorte  de cacher cette partie « bizarre » de moi. Là, dès la lettre de motivation les choses étaient différentes. Mais il ne suffit pas d’être paire pour savoir comment faire. Je devais faire un pas de côté par rapport à mon expérience passée.

J’ai commencé la formation quatre mois après avoir pris le poste. Nous avons donc décidé en équipe que je prenne mon temps pour expérimenter la pratique parallèlement aux enseignements. J’ai fait des retours réguliers en réunion d’équipe sur mes temps de formation  pour partager les ressources et les questionnements que cela suscitait. Nous avons décidé de mettre en place un groupe de travail qui débutera en mars 2022 pour dessiner ensemble les contours de ce nouveau métier…

Pour terminer, je citerai un enseignant de la formation, Nicolas Chambon qui écrit à propos des pairs aidants « Ils ou elles nous amènent à prendre au sérieux les « petites choses de la vie », souvent trop oubliées dans notre quotidien fait de projets, de comptes rendus… Et oui, il est important de sourire…»

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