20 juillet 2022

C’est l’histoire de …

C’est l’histoire d’une rencontre, entre l’abej SOLIDARITÉ qui en 2025 fêtera ses 40 ans au service des personnes privées de logement et mon désir de donner la parole à ces personnes, d’accueillir leurs mots riches de leur expérience et de leurs espoirs.

Ma mission : recueillir les paroles des personnes accompagnées par l’abej SOLIDARITÉ pour qu’en 2025 des comédiens puissent s’emparer de leurs textes, en faire la lecture dans un grand théâtre lillois. Ce que ces hommes et femmes ont à nous dire doit être entendu avec le plus grand respect !

Me voilà donc partie, dictaphone dans la poche et dans mon sac à dos: images, poésies, jeux de langage, papier, stylos, feutres..  tout ce qui me semble  pouvoir aider à  l’expression.

La rue, les accueils de jour, la Halte de nuit ; le Foyer d’Accueil Médicalisé (FAM), le Centre d’Hébergement et de Réinsertion Sociale (CHRS) ou encore les Lits d’Accueil Médicalisés (LAM) : mon terrain d’investigation est multiple, à l’image des réalités multiples des personnes accompagnées par l’association.

Voilà cinq mois que cette riche aventure a commencé : ateliers d’écriture, interviews ou encore jeux autour des mots, j’essaie de m’adapter aux désirs, aux attentes, aux capacités des personnes rencontrées, des équipes aussi.

La première impression, émotion, forte, est la qualité des rencontres.

Il y a ceux qui sont enthousiasmés par la proposition, comme Laurent qui arrive aux ateliers avec des textes, des propositions ou Alain qui après une première interview s’est acheté un cahier pour poursuivre son récit.

Ceux qui semblent plus détachés comme Jason mais qui à chaque fois que je le croise dans la rue me demande s’il y aura bien atelier mercredi ! Ou encore Chantal qui dit qu’elle n’a pas envie d’écrire, ni de parler mais qui pourtant s’installe à ma table dès que je sors mon matériel.

Il y a ceux qui disent non, et qui viennent voir, l’air de rien, comme Gwendoline, qui  à la fin de l’atelier  me demande des exercices pour les faire dans sa chambre, ou encore Karim qui refuse d’être interviewé et me parle pendant plus d’une heure…

Il y a ceux dont le non est un vrai non, mais qui m’accueille malgré tout avec beaucoup de gentillesse.

Je dois également jongler avec les diverses pathologies, ceux qui ont du mal à se concentrer, à trouver des mots, à faire des phrases, à ne pas répéter toujours les mêmes choses et ceux dont l’esprit fuse mais qui sont prisonniers de leur corps, qui sont obligés de me dicter ce qu’ils voudraient écrire, comme Julie.

J’aime cet exercice qui me demande à la fois, du bien préparer les rencontres, de trouver à chaque fois des propositions qui me semblent adaptées, d’amener de quoi nourrir l’écriture, de relire ce qui a déjà été dit ou écrit pour dégager un chemin, et d’être, en même temps,  dans la plus totale improvisation, bousculée par le réel, les humeurs et les désirs du jour.

Je tiens à souligner aussi l’importance des équipes de salariés des structures dans lesquelles j’interviens. Ils sont des relais précieux.

Merci à ceux qui participent aux ateliers, sans qui ce serait beaucoup plus compliqué de jongler avec la diversité des personnes, merci pour leur implication aussi dans l’écriture, c’est un cadeau tant pour les résidents que pour moi-même. Merci à ceux qui me présentent les personnes qui pourraient être intéressées, qui leur en parlent, les encouragent, sans eux, je passerais sans doute à côté de belles rencontres.

Partage d’un écrit sur le thème de la drogue :

La drogue, mot vulgaire et mal compris…
Alors je parlerai d’addiction… tout le monde a une addiction : riche, pauvre, résidents, éduc, jeune, vieux, noir, blanc…
Une addiction c’est quoi ?
Une chose dont on ne peut se passer… mais alors tout peut être addiction : le chocolat, la coke, la violence, l’adrénaline, les jeux, l’alcool, l’héro…
Mais alors j’oublie le mot addiction et parle de parcours et de chemin qui se croisent, la mauvaise rencontre..
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Chrstine Simon
« Par Mots et par Vies » https://rues.blog4ever.com/

Ces cinq premiers mois me confortent dans la conviction que ces personnes privées de logement ont des choses à nous apprendre, que leurs paroles ont du prix, que les mots peuvent être de formidables moyens d’expression pour eux. J’espère être juste une petite courroie de transmission, j’y travaille avec cœur.

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